L’agence S&P est la troisième à estimer que l’évolution des paramètres économiques du Ghana rend incertaine sa capacité à rembourser sa dette, due aussi bien à ses créanciers locaux qu’internationaux. Une décision qui risque de provoquer une nouvelle polémique.
S&P Global Ratings a, dans une note publiée le 5 août 2022, abaissé les notes du Ghana en tant qu’émetteur de dettes internationales et locales à CCC+ et C, ce qui signifie que le risque d’un ou plusieurs défauts de remboursement est désormais « très élevé ». L’agence américaine de notation estime aussi que les perspectives relatives à cette situation sont négatives.
Elle a estimé que les efforts entrepris par le gouvernement de la deuxième économie de la CEDEAO pour réduire la position déficitaire de son budget sont insuffisants à restaurer l’équilibre sur sa dette, car ses coûts d’emprunts augmentent rapidement, alors que la croissance économique évolue à un rythme plus lent, ce qui contribue à dégrader davantage le ratio dettes sur produit intérieur brut.
Mais sur le plan international, c’est la capacité du pays à rembourser sa dette extérieure qui fait l’objet de plus d’inquiétudes chez les experts de S&P. « La pandémie et la guerre Russie-Ukraine ont amplifié les déséquilibres budgétaires et extérieurs du Ghana. Les sorties de capitaux des non-résidents sur le marché local des obligations d’État, le manque d’accès aux marchés des eurobonds, les achats de dollars par les particuliers, les paiements de dividendes aux investisseurs étrangers et les importations plus coûteuses de produits pétroliers raffinés, ont fait grimper la demande de devises, entraînant un des niveaux de réserves de change les plus faibles depuis le quatrième trimestre de l’année dernière », ont-ils fait savoir selon le document consulté par les experts.
S&P pense aussi que les autorités ghanéennes ont désormais peu d’options pour refinancer leur dette publique, car l’accès au marché international des capitaux est devenu plus difficile pour eux, alors que les banques commerciales internes ne peuvent pas soutenir les besoins du gouvernement.
Le Ghana est pourtant crédité de bons points en matière de gouvernance économique. Il paie surtout le prix d’une conjoncture internationale qui est négativement impactée par la crise russo-ukrainienne, et par l’incapacité des autorités américaines à trouver une solution cohérente à la flambée du dollar, la devise utilisée dans 60% des transactions économiques internationales.
Ces facteurs mondiaux ont eu pour conséquence un durcissement des coûts de vie dans le pays et ont poussé de nombreux ménages à recourir à des alternatives pour consommer moins cher, ce qui a pour effet de diluer les efforts qui ont été fournis pour réduire le secteur informel et accroître la mobilisation des ressources fiscales.
Cette nouvelle note de S&P Global Ratings risque d’enfler la polémique sur la pertinence des avis émis par les agences de notation sur les économies africaines. Jusque-là seules Moody’s et Fitch Ratings avaient abaissé la note souveraine du Ghana et le gouvernement avait critiqué particulièrement la décision de la première institution.
Les autorités ghanéennes ne sont pas les seules à être critiques face aux conclusions des agences de notation. Selon une étude publiée par les Nations Unies le 31 décembre 2021, 41 % des pays notés d’Afrique subsaharienne ont été dégradés au moins une fois entre février 2020 et mars 2021, soit la moyenne régionale la plus élevée, contre seulement 6 % pour les économies avancées. La conséquence a été qu’aucun pays d’Afrique subsaharienne n’a pu émettre d’eurobonds durant une bonne partie de l’année 2020, alors qu’eux aussi devaient faire face à des confinements imposés par la Covid-19.
La Rédaction (avec DM et CA)