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  • Dernière modification de la publication :25 avril 2024
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Le déploiement du 1er vaccin contre le paludisme depuis 2019/2020 (RTS, S), a constitué une avancée majeure, à la fois sanitaire, technologique et médicale. C’est particulièrement vrai pour les enfants de moins de 5 ans, chez qui le paludisme représente la 4ème cause de mortalité en Afrique subsaharienne. Mais malgré les 6 millions de doses déjà administrées, la vaccination devenait incapable de répondre à la demande mondiale, atteignant une forme de palier. Avec la qualification fin 2023 d’un deuxième vaccin, le R21/Matrix-M, la lutte contre le paludisme devrait donc franchir un nouveau cap, l’OMS et la GAVI (Alliance Mondial du Santé) prévoyant à terme jusqu’à 100 millions de doses. Petit comparatif des deux vaccins anti paludisme aujourd’hui disponibles, avec leurs avantages et leurs inconvénients respectifs.

Le premier vaccin RTS, S/AS01 E (Mosquirix®) : ses principales caractéristiques

Depuis 2019, ce premier vaccin contre le paludisme a été administré dans 3 pays, à travers la mise en place de programmes nationaux de vaccination des enfants. Cette mise en œuvre coordonnée par l’OMS s’est finie fin 2023, prouvant l’efficacité et l’innocuité du vaccin et autorisant son utilisation à large échelle pour la prévention du paludisme chez les enfants.

Le vaccin RTS, S/AS01E, c’est quoi ?

Développé depuis 1980 par les laboratoires GSK (Glaxo Smith Kline) et commercialisé depuis 2015 sous la marque Mosquirix®, le vaccin RTS,S / AS01E est un vaccin bivalent recombinant et adjuvé : -bivalent, car il combine une protection contre le paludisme et l’hépatite B ; -recombinant, car il utilise des protéines immunogène propres à chaque agent infectieux, produites par génie génétique : il fusionne ainsi l’antigène de surface de l’hépatite B (S) à une portion de la protéine circumsporozoïte CSP du Plasmodium falciparum (RTS) ; -adjuvé par l’adjuvant AS01E, formé de liposomes et de saponine végétale, afin d’augmenter la qualité et la durée de la réponse immunitaire.

Son coût unitaire est estimé à environ 9 $. GSK a récemment approuvé un transfert de technologie, permettant au fabricant indien Bharat Biotech de produire bientôt le vaccin RTS, S à encore plus grande échelle.

Quelle est l’efficacité du vaccin RTS, S ?

Les différentes études de phase 3 ont prouvé que le vaccin Mosquirix® RTS,S/AS01 prévient une majorité des cas de paludisme clinique grave, au cours des 18 mois suivant la 3ème dose de vaccination. Son effet semble d’autant plus net que les enfants vivent en zone d’endémie paludique importante. Les cas de paludisme ont ainsi baissé de moitié après vaccination, allant de 75% après le pic saisonnier à 40% dans les 4 ans après vaccination : la mortalité baisse au total de 13%.

Comment s’utilise le vaccin RTS, S/AS01 ?

Suite à l’avis favorable en juillet 2015 de l’Agence Européenne des Médicaments (EMA), l’OMS a recommandé un protocole pilote pour les enfants de plus de 5 mois avec 3 doses initiales à au moins un mois d’intervalle, complétée par un rappel 15 à 18 mois après la 3ème dose. L’administration se fait par voie intra-musculaire. L’âge minimal de 5 mois peut être légèrement avancé, pour répondre notamment à des contraintes pratiques sur le terrain, sans danger pour les enfants.

Où a été utilisé le vaccin Mosquirix® ?

C’est en 2019 que l’OMS a mis en place le MVIP, Programme de mise en œuvre du vaccin contre le paludisme, dans 3 pays pilotes : Kenya, Malawi et Ghana. Au total, 6 millions de doses ont été administrées à 2 millions d’enfants, prouvant l’efficacité et l’innocuité de ce vaccin. Les résultats de cette prophylaxie médicale sont d’ailleurs amplifiés si les mesures hygiéniques de lutte contre les insectes sont en même temps appliquées.

Après cette phase pilote réussie, le vaccin a été étendu aux autres pays d’Afrique. Dès novembre 2023, 1,7 millions de doses ont été fournies au Sénégal, au Burkina Faso, au Niger, au Liberia et au Sierra Leone. Début 2024, plusieurs millions de doses étaient aussi livrées en RDC, au Bénin, en Ouganda, au Burundi, et au Cameroun, ce dernier l’ayant d’ores et déjà intégré à sa stratégie nationale de vaccination. A l’échelon du continent africain, la demande est donc sans précédent, avec plus de 30 pays africains souhaitant inclure le vaccin contre le paludisme dans leur programme de vaccination infantile.

Malgré de possibles transferts de technologie et de nombreux investissements dans l’économie de la santé, les 18-20 millions de doses prévues à l’origine par GSK pour la période 2023-2025 risquent donc de s’avérer insuffisantes : c’est pourquoi la récente arrivée du vaccin RTS 21 apporte un espoir supplémentaire.

Le nouveau vaccin contre le paludisme R21 : tout savoir

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Avec la qualification d’un nouveau vaccin antipaludique, le R21/Matrix-M, la lutte vaccinale contre la malaria devrait franchir un nouveau palier dès 2024/2025. Dès avril 2023, le Ghana a d’ailleurs décidé de reconnaître ce nouveau vaccin R21 pour les enfants de 5 à 36 mois, suivi du Nigeria et du Burkina Faso.

C’est quoi le vaccin R21 Matrix M ?

Développé par l’Université d’Oxford, fabriqué à échelle industrielle en Inde par le Serum Institute of India (SII), et commercialisé par le laboratoire américain Novavax, le vaccin antipaludique R21/Matrix-M est le fruit d’une collaboration mondiale. Un transfert de technologie en cours va permettre au Ghana de fabriquer ce vaccin à Accra, et d’autres états pourraient suivre tant les investissements dans ce domaine de la santé semblent prometteurs.

Le R21 est un vaccin inerte sous-unitaire, ciblant une protéine sécrétée par le sporozoïte, la forme initiale de développement du parasite Plasmodium falciparum dans le sang humain. La production des anticorps contre cet antigène va ainsi bloquer le cycle de développement parasitaire, responsable de la maladie. Cette réponse immunitaire est amplifiée par l’adjuvant matrix M présent dans le vaccin, développé par Novavax® à partir de saponines naturelles ( Quillaja saponaria).

Quelle est l’efficacité du vaccin R21 / Matrix M ?

Plus récent que le vaccin Mosquirix de GSK, le vaccin R21 n’a pas encore livré tous ses secrets, avec des études en cours de finalisation. Il semble toutefois donner des résultats excellents, peut-être même supérieurs à ceux de son prédécesseur.

Si le R21 est administré avant le pic saisonnier, il réduit de 75% le nombre de cas cliniques dans les 12 mois suivant la 3ème dose de primo-vaccination. Une 4eme dose de rappel, un après la troisième, maintient cette protection. Lorsque la vaccination se fait indépendamment du pic endémique, selon un calendrier basé uniquement sur l’âge de l’enfant, la protection est d’environ 66%. Si l’on extrapole les données du vaccin RTS,S, l’impact sur la transmission devrait être aussi notable. Avec un prix moyen de 3$ la dose, les rapports bénéfices/risques et coût/efficacité s’avèrent donc excellents.

Où se déploie le nouveau vaccin contre le paludisme R21 / Matrix ?

La phase 3 d’étude du vaccin a porté sur 4 800 enfants originaires du Burkina Faso, du Mali, du Kenya, et de la Tanzanie. Mais dès 2023, d’autres pays ont montré leur intérêt, le tout premier étant le Ghana où une usine de fabrication est en cours de construction. D’autres pays pourraient prochainement bénéficier d’investissements conséquents, tant la demande semble importante.

A terme, le Serum Institute of India vise en effet 200 millions de doses annuelles, en complément du RTS, S. Notons d’ailleurs qu’à ce jour, il n’existe aucune étude comparative entre les 2 vaccins antipaludiques. Nul doute que de nouvelles données vont venir améliorer les connaissances actuelles sur l’efficacité déjà connue de ces deux nouveaux produits, transformant radicalement la lutte contre le paludisme et son pronostic chez l’enfant dans les 10 ans à venir.

La recherche va bien évidemment se poursuivre, d’autant que les chercheurs seront attentifs pour voir si le parasite s’adapte ou pas aux réactions vaccinales. La lutte contre le paludisme par la vaccination ne fait donc que commencer, justifiant des investissements croissants dans la recherche fondamentale, la recherche clinique, et les unités de production dans plusieurs pays d’Afrique et d’Afrique sub-saharienne. C’est un sujet que va suivre particulièrement SEMEN CONSULTING AFRICA, tant les espoirs à court-terme sont encourageants et prometteurs.

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